Symbolisme renaissant
Si je devais nommer l'art que j'ai envie de défendre cela serait "le symbolisme renaissant". C'est après avoir réétudié mes écrits et mes travaux que je suis arrivée à une sorte de synthèse à partir des idées et thèmes récurrents. En effet, avant de connaître le projet d'Hélène, je me croyais pionnier d'un nouveau mouvement artistique ou du moins d'une nouvelle forme. Après quelques brèves discussions avec elle, je me suis rendue compte que je faisais du symbolisme beaucoup plus souvent que je ne le pensais. Ainsi, je vais tenter d’exposer les raisons de mon intitulé.
Symbolisme renaissant : il puise encore plus loin que le mouvement symboliste, il revient à l’essence même de l’homme, à l’époque primitive où l’expression de soi passait déjà par l’art, par une forte spiritualité et par la présence des symboles.
Le mouvement symboliste était élitiste, là, il s’agit de réconcilier des éléments et s’adresser à l’humanité toute entière pour l’atteindre. Je m’inscrit alors, avant tout dans un humanisme, raison pour laquelle j’insiste sur le terme de renaissance, en hommage au premier courant humaniste.
Tout d’abord, l’idée du « symbolisme renaissant » répond à plusieurs influences et puise ses sources de plusieurs époques et de l‘essence même de l‘humanité. Le symbole tout comme l’art, est quelque chose de profondément encré dans cette dernière. L’art est dans le symbolisme comme le symbolisme est dans l’art. En effet, je pense même que ceux qui croient faire de l’art d’une façon extérieure au symbolisme le font inconsciemment, car qu’est ce que l’art si ce n’est une irrésistible expression de l’humain par rapport au monde qui l’entour, à travers une volonté de dépasser (se libérer même) le réel et le matériel en saisissant l'invisible. C’est une quête spirituelle qui tente désespérément trouver un sens. Le geste artistique est toujours un geste créateur et c’est ce qui différencie l’espèce humaine d’une n’importe quelle autre : en continuant la création nous accomplissons ce qui caractérise les dieux. Mais faire de l’art n’est pas chose utile en soi et de nombreux scientifiques diront que ce qui définit l’humain est son intelligence et sa capacité de fabriquer des outils pour sa survie et pour son confort. Pourtant, nos ancêtres, les homo-sapiens, ont survécu aux néandertaliens, qui étaient plus robustes et avaient les mêmes outils. Ces derniers ne se réunissaient qu'en petits groupes, alors que leurs rivaux avaient une chose subtile mais capitale, leur permettant de se lier et de former une véritable société : les échanges des objets d’arts et de croyances diverses, les rassemblements pour des rituels à caractères spirituels et artistiques (l’un et l’autre étant étroitement liés) nous ont donc sauvé. Cette preuve scientifique nous rappelle notre nature primitive, faire de l‘art est d‘une importance vitale pour nous. Or, le symbole a les mêmes caractéristiques que l’art.
Dès le départ, l’Homme laisse des traces de sa présence dans un art, qui non seulement comporte des symboles mais aussi, témoigne lui-même d’un geste symbolique : l’individu pose son empreinte sur le monde visuel, hors du temps et donc hors de son existence, qu’il soit entrain de peindre dans une grotte (en crachant de la peinture c’est directement une partie de soi qu’il projette) ou entrain de sculpter une représentation d’une divinité.
L’art est une représentation symbolique de nos rapports à la Nature, à nous et entre nous.
Aujourd’hui, j’ai sentis un besoin de réconciliation chez les Hommes. La perte de repère provoque un besoin qui nous pousse à nous accrocher à "quelque chose" qui recèlerait plus de profondeur, que ce qui nous entour dans cet ère d’apparences, d’images et de faux semblants. On veut voir "quelque chose", qui dépasse la surface, "perce-voir" une autre vérité, immuable peut être. Cela pourrait expliquer la recherche de notre génération, plus particulièrement, de signes et de symboles dissimulés, car qu’est ce qu’un symbole si ce n’est un simple élément anodin dépassant sa fonction première (manière d‘accéder à un niveau spirituel, insaisissable). Dans la plupart des cas, une chose matérielle, qui transcende son état premier et devient universel voir éternel.
Le symbole réuni car il appartient à une mémoire collective.
Tout ce qui vient d’être dit va déjà me servir à faire comprendre (ou du moins je l’espère) mon intention de dépasser l’époque du mouvement symboliste du début de XX° siècle. Je pense qu’il s’agit pour les autres comme pour moi, de trouver une nouvelle forme artistique en corrigeant ce qui n’a pas marché dans le précédent model. Pour ma part, l’élitisme (dans le courant symboliste) tout comme la volonté d’hiérarchiser et politiser les arts (dans l’Art Total) me posent problème. Je suis d’accord avec le fait que tout le monde n’est pas apte à aimer l’Art, dans la mesure où il est une affaire de sensibilité et comme disait ma prof d’Histoire des Arts, « le goût pour l’art est déjà un don en soi ». Mais ce n’est pas une raison pour ne pas en faire profiter tout le monde ou pour l’instrumentaliser d’une manière ignoble.
Si l’art est un acte gratuit, pourquoi son partage ne le serait il pas?
Malheureusement, l’art est aussi synonyme de pouvoir et de l’emprise envoutant sur le peuple, c’est pourquoi nos dirigeants (les politiques et les possesseurs d’argent) tentent de saisir ce qui ne cesse de leur échapper par essence. Quand on entend que seule la marchandisation de l’art sera la réponse à la démocratisation culturelle, je ne peux m’empêcher de penser à la plus affreuse des antithèses. Tout ce qu’on peut voir ou entendre à la télévision et à la radio est d’un niveau médiocre et le public habitué à ce genre de types réduits « d’expression artistique » n’est pas très exigeants. Ces deux moyens de l’éventuel partage culturel ayant échoués seul l’Internet semble être le véritable outil de démocratisation culturelle. Mais, le gouvernement n’aimant pas ce qui lui échappe s’engage à instaurer des lois qui vont creuser encore plus d’inégalités, comme d’habitude. Et ce qui autrefois, avait la vertu de nous réunir, nous sépare en consolidant la création des sphères sociales obéissants à des lois d’ordre hiérarchique. Hier, l‘aristocratie gardait l‘exclusivité de l‘art pour marquer sa sophistication et sa distinction, aujourd’hui, n’importe quel abrouti ayant un peu de pouvoir et de l‘argent. Dans les deux cas on peut observer une volonté de (re)former une élite.
Si j’ai parlé en terme de « renaissance », c’est justement parce que je vois dans cette période une décadence. Comme aujourd’hui, le mouvement renaissant est apparu après une longue période d’obscurantisme (1000 ans du Moyen-âge) correspondant à l’époque de la monté des idées religieuses diverses ayant une forte influence sur les Hommes. C‘est pourquoi je rejette toute forme de religion qui divise au lieu d‘unir. Etrangement, le catholicisme qui prédominait dans la guerre des religions en proclamant « l’éclaircissement » des âmes et des esprits avait au contraire, fait place à une époque la plus sombre de notre Histoire... La Renaissance est donc le temps de l’émancipation de l’Homme mais, qui cherche à se reconnecter à l’univers entier (figuré par la nature ou le cosmos) : là est ce qui m’intéresse, puisque notre époque est aussi décadente. Nous nous sommes coupés de la nature, par conséquent de nous-mêmes. Ainsi, nous avons besoin de renaître.