Si Tati et Podalydès étaient Symbolistes
Si l'on pouvait dire de Jacques Tati qu'il à une part de poésie dans la lignée de Cocteau, on pourrait dire également que Denis Podalydès est de cette même ligné, en bordure du symbolisme, si du moins l'on pouvait juger le symbolisme contemporain ainsi.
Comment dès lors, ne pas rapprocher Bancs publics(Versailles rive droite)de Playtime de Tati?
Tout d'abord, ce même univers de la poésie du petit détail, de la poésie de l'instant. Un scénario où le personnage individuel s'efface pour ne laisser la place qu'au groupe social, au témoin du temps: la société. Podalydès s'y fait même plus discret que Monsieur Hulot. On y est déjà habitué, on nous a déjà fait le cou. Si l'on perd Hulot au cour du film pour le retrouver gentiment amoureux à la fin. Dans Banc public, c'est le contraire: Aimé apparaît d'abord comme un figurant, garde le mystère, il ne faut pas savoir que c'est lui, l'homme à la banderole ''homme seul'' (lui-même ne le sait pas). Les rôle sont même inversé: Hulot cherchait la belle Américaine, ici, ce sera la belle Julie qui cherchera Aimé.
Comme playtime, le film débute longuement sur l'univers du bureau, de l'impersonnel. Comme playtime, il se poursuit en explorant l'univers du magasin. Comme playtime, il parle d'une petite passion amoureuse. Comme playtime, il se finit sur un manège de poésie, où le rond-point aux réverbères-marguerite laisse la place à un square circulaire entouré de bitume...
Il ne fait aucun doute que ce film est un hommage au célèbre fumeur de pipe. Avec un Denis Podalydès au même humour poétique pour relève. Car la poésie et la référence n'excluent pas l'humour. Les temps changes, mais la poésie et la cocasserie d'une société qui ne sait pas s'arrêter reste. Les gens sont toujours seuls, noyés dans cette société plus que jamais égoïste et capitalisée. Humours et poésie dans les mots, dans l'enceinte d'un bureau, dans un square, dans un magasin de bricolage (pour ne pas dire les grands magasins de playtime à l'avant-garde incompréhensible...).
Car la solitude, le voilà le fil conducteur du film. Comme Tati, le film prend le temps de s'arrêter là où la société ne s'arrête pas, là où personne ne voit la poésie. Tous sont seul, qu'il soit célibataire où en couple, qu'ils jouent au manège des rencontres et des ruptures. Tous tournent en rond. Comme les poissons dans leur bocal, comme l'eau dans le bassin circulaire. Poissons et manèges ponctuent ce film de leur douce thématique, à en tourner en rond.
Le film s'ouvre d'ailleurs sur le monde des transports en commun, escalators, métros... mais au touristes envahissant, c'est directement à la petite employée de bureau au chignon impeccable que l'on à affaire. Poésie vertigineuse du manège de la vie. Du matin jusqu'au soir comme dans playtime. Une journée de la vie humaine (servie par un casting impressionnant). Et les tableaux en entraînent d'autres. Le bureau donne sur la fenêtre qui donne sur la banderole de l'appartement d'aimé, qui travaille à la quincaillerie avec ses collèges farceurs... pour qu'enfin Julie rencontre Aimé. Et là, Podalydès répare une longue frustration: l'histoire se fini bien, tout le bureau veut assister au baiser que Hulot n'a pas reçu.
Car il s'agit bien là encore de ce voyeurisme un peu sain, de notre société. Avec l'ère du cinéma qui nous montre tout. Personne ne verra le baisé, mais tous l'attendront et le devineront. Il s'agit donc bien là d'un hommage au film le plus complexe de Tati. On aurait presque envie que le générique de fin durent quatorze minutes... même les affiches se ressembles...
Alors le symbolisme contemporain, ce serait aussi cette poésie remplie d'allusions, de symboles et de culture. Toujours prête à nous montrer l'ailleurs pour nous montrer la vérité.